Premières prévisions de la météo du noyau terrestre

Alerte presse émise le 27 janvier 2016 par le CNRS

Le champ magnétique terrestre, qui trouve sa source dans le noyau fluide de la planète, interagit fortement avec certaines technologies, comme les satellites ou des applications embarquées dans les smartphones, d’où l’importance de comprendre et prédire ses variations. Tels ont été les objectifs des travaux menés par des chercheurs de l’Institut de physique du globe de Paris (CNRS/IPGP/Univ. Paris7) et de l’Institut des sciences de la Terre (ISTerre : CNRS / Univ. Grenoble Alpes et Savoie Mont-Blanc / IRD / Ifsttar, OSUG), à l’aide d’une approche calquée sur celle développée en météorologie.

Visualisation de la structure dynamique interne du noyau
estimée à partir des observations de surface et du comportement d’un modèle informatique de la géodynamo, qui est le mécanisme par lequel l’énergie des mouvements de convection du noyau produit le champ magnétique terrestre.
Les structures tourbillonaires de l’écoulement sont représentées en rouge et bleu. Le champ magnétique interne est représenté en orange et violet, ainsi que par les lignes de champ dans le volume qui sont tordues par l’écoulement.
© Julien Aubert, IPGP/CNRS

Ces derniers ont d’abord expliqué les raisons de la décroissance de l’intensité du champ magnétique terrestre de 10% depuis 1840. Le coupable est la présence d’une anomalie de ce champ, d’intensité plus faible, située au-dessus de l’Amérique du Sud de nos jours : elle déséquilibre le mécanisme de transport du champ magnétique. Ce mécanisme s’appuie sur un tourbillon géant à la surface du noyau, qui, à la manière d’un tapis roulant, déplace le champ magnétique des pôles vers l’équateur au niveau de l’Asie, et de l’équateur vers les pôles au niveau de l’Amérique. Les simulations des scientifiques prédisent que l’anomalie et le tourbillon sont intimement liés et qu’ils devraient tous deux dériver d’environ 3000 kilomètres vers l’Ouest (à la surface de la Terre) dans les cent prochaines années. L’anomalie se creusera de manière significative dans le siècle à venir, ce qui élargira la zone problématique pour le vol des satellites [1]. Mais, de même qu’on ne peut prédire avec certitude le temps qu’il fera dans un an, il est impossible de prévoir le comportement du champ magnétique terrestre à plus long terme, et en particulier la prochaine inversion des pôles.

Carte (centrée sur l’Atlantique) de l’écoulement de grande échelle à la surface du noyau
qui s’organise comme un grand tapis roulant provoquant une dérive vers l’Ouest.
© Nicolas Gillet, ISTerre/CNRS
Evolution de l’intensité du dipôle géomagnétique
(exprimée en micro-teslas) au cours des 175 dernières années, et prédiction pour le siècle à venir, avec la marge d’incertitude.
© Julien Aubert, IPGP/CNRS
(exprimée en micro-teslas) à partir de 2015 et jusqu’en 2115 dans le cadre d’une prédiction par assimilation de données géomagnétiques. L’anomalie est représentée par les lignes en bleu sombre. © Julien Aubert, IPGP/CNRS



Références

Ces travaux ont bénéficié des soutiens notamment du CNRS, du CNES, de l’ANR et de Genci.

 Gyre-driven decay of the geomagnetic dipole, C. Finlay, J. Aubert, N. Gillet.
Nature Communications, 27 janvier 2016, doi : 10.1038/ncomms10422.
 Geomagnetic forecasts driven by thermal wind dynamics in the Earth’s core, J. Aubert. Geophysical Journal International 203, 1738-1751, décembre 2015, doi : 10.1093/gji/ggv394

Contact scientifique local
Nicolas Gillet, ISTerre-OSUG : 04 76 63 52 21 / nicolas.gillet |at| ujf-grenoble.fr

Cette actualité est également relayée par
 l’Institut national des Sciences de l’Univers (INSU) du CNRS
 la délégation Alpes (DR11) du CNRS
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[1Le matériel embarqué dans les satellites de basse altitude subit un taux d’avaries significativement important lorsque ceux-ci passent au-dessus de cette zone.

Mis à jour le 10 décembre 2019