Séismes en essaim en Ubaye

Séismes ressentis le 26.02, le 27.02, le 02.03, le 25.03...

Communiqué du 25 mars :

Le réseau de détection sismique de l’observatoire de Grenoble (Sismalp) a enregistré, le dimanche 25 mars 2012 à 10 h 05 (heure locale) un séisme de magnitude 3,4 dont l’épicentre était situé dans la haute vallée de l’Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence). Les coordonnées épicentrales sont 44°29.0’N et 6°40.7’E. Le foyer était situé à 6 km de profondeur. Ce séisme a été ressenti localement dans la vallée de l’Ubaye, ainsi que probablement dans l’Embrunais et le Guillestrois (Hautes-Alpes). Par comparaison avec les autres séismes de magnitude équivalente survenus dans ce secteur depuis un mois, le séisme de ce matin a pu être ressenti à beaucoup plus grande distance.

Ce séisme fait en effet partie de la crise sismique en essaim qui a débuté à cet endroit il y a un mois et qui a produit au total plus de quinze cents séismes. C’est le séisme de plus forte magnitude depuis le séisme de magnitude 3,6 du 2 mars au matin. Une localisation précise montre que son épicentre est situé à un peu plus de 2 km au sud-est du séisme principal de magnitude 4,3 du 26 février, c’est-à-dire dans la vallée du Parpaillon, un affluent de l’Ubaye.

On observe statistiquement dans le grand quart sud-est de la France seulement trois événements de magnitude supérieure à 3 chaque année. Avec sept secousses qui atteignent ou dépassent ce seuil depuis un mois dans un secteur de quelques kilomètres carrés, la haute vallée de l’Ubaye se signale par sa sismicité hors norme. Cette crise sismique en essaim semble caractérisée par des séismes répétitifs de magnitude comprise entre 3 et 4. Il est fort vraisemblable que d’autres tels séismes se produisent encore dans les semaines ou les mois à venir.

Communiqué du 15 mars :

Ce communiqué a pour but de faire le point sur le séisme de magnitude 4,3 qui s’est produit le 26 février 2012 dans la vallée de l’Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence), ainsi que sur les quelque 1 000 secousses (dont une trentaine ressenties) détectées dans ce secteur au cours des 20 derniers jours.

L’épicentre du séisme du 26 février, calculé par le réseau sismologique de l’observatoire de Grenoble (réseau Sismalp), est situé par 44°30’N et 6°40’E, à proximité de Saint-Paul-sur-Ubaye, dans les Alpes-de-Haute-Provence. Ces coordonnées géographiques correspondent à celles du sommet oriental de la Montagne de Parpaillon qui culmine à près de 3 000 m et qui marque la limite entre les communes de Saint-Paul-sur-Ubaye, La Condamine-Châtelard et Crévoux (Hautes-Alpes). Saint-Paul est le village le plus proche de l’épicentre (un peu moins de 7 km) ; Crévoux n’en est guère plus éloigné (un peu plus de 7 km) ; certains séismes qui se sont produits début mars ont leurs épicentres à moins de 6 km du village de La Condamine.

Le foyer du séisme du 26 février était situé à 8 km de profondeur par rapport au niveau de la mer, soit 11 km sous la surface. Le « mécanisme au foyer » a pu être calculé en utilisant les observations faites par une cinquantaine de stations sismologiques situées dans les Alpes françaises, suisses et italiennes. Ce mécanisme montre clairement que la faille qui a fonctionné lors de ce séisme est une faille dite « normale » d’orientation NNW-SSE qui a permis au compartiment tectonique situé à l’ouest (Barcelonnette) de s’affaisser d’environ 1 cm par rapport au compartiment situé à l’est (Saint-Paul).

La haute vallée de l’Ubaye est l’une des zones les plus sismiques des Alpes françaises. En 1959, un séisme de magnitude 5,5 qui s’était produit à proximité de Saint-Paul (vraisemblablement à 6 km au nord du village), avait généré d’importants dégâts immobiliers et fait deux blessés. Ce séisme avait été suivi de répliques pendant plusieurs mois. Plus que des séismes violents tels que celui de 1959, l’Ubaye est plutôt coutumière de crises sismiques dites « en essaims » lors desquelles l’activité sismique se manifeste, en un lieu bien précis, pendant plusieurs semaines, voire plusieurs mois, avec une succession de secousses de magnitudes variées, sans que l’on puisse être certain que la magnitude maximale ait été atteinte. Une telle crise en essaim a été ainsi observée sous La Condamine en 2003–2004 en travers de la vallée de l’Ubaye, avec plus de 16 000 séismes comptabilisés en 2 ans, dont 5 séismes de magnitude 2,5 à 2,7.

L’activité sismique enregistrée depuis le 26 février 2012 est importante : plus de 1 000 séismes détectés ; plus de 500 localisés ; vraisemblablement une trentaine ressentis. Deux stations sismologiques temporaires transmettant leurs données à Grenoble ont été installées le 1er et le 10 mars à Tournoux (Saint-Paul) et à Sainte-Anne (La Condamine) pour renforcer la surveillance assurée par Sismalp. La sismicité observée fait penser qu’un essaim analogue à celui de 2003–2004 a été activé par le choc principal (en blanc sur la carte : essaim de 2003–2004 ; en rouge : essaim de 2012 ; en noir : événements les plus récents). Cet essaim est cependant distinct du précédent : bien que situé dans le même alignement NW–SE, son orientation ne semble pas être tout à fait la même ; il ne fait que 4 km de long au lieu de 9 ; son activité se manisfeste par des secousses de magnitude 2 à 3 suivies, pendant quelques heures, d’une séquence de répliques de magnitude moindre, avant qu’un calme relatif ne se réinstalle. Le réseau de failles de l’essaim actuel est probablement plus complexe que celui de l’essaim précédent, comme le suggère la carte de localisation, les mécanismes au foyer, et aussi la façon dont des séismes de magnitude équivalente sont très différemment ressentis en un même lieu, alors que leurs foyers sont très proches.

L’activité a légèrement migré entre le 26 février et le 2 mars : les deux séismes du 27 février se sont produits un peu plus au sud-est que le séisme principal, le séisme du 2 mars encore plus au sud-est, vers le Plan de la Malle Haute (vallée du Parpaillon). Cette « migration » vers le sud-est semble s’être interrompue, et l’activité se concentre désormais à l’extrêmité nord-ouest de l’essaim, à l’aplomb de la limite départementale entre les Alpes-de-Haute-Provence et les Hautes-Alpes. Il est important de noter que la zone de la vallée du Parpaillon située au nord-ouest de La Condamine présente, entre Sainte-Anne et le Plan de la Malle Haute, une « lacune sismique » de 2 à 3 km de long, entre l’essaim de 2003–2004 et l’essaim actuel.

La sismicité de l’Ubaye est très capricieuse et il est impossible de prévoir le détail de l’évolution du présent essaim. Des séismes se reproduiront très probablement dans le secteur actuellement actif au cours des semaines ou des mois à venir. Comme les foyers sont relativement profonds (7 km en moyenne), ils continueront à être ressentis de façon parfois désagréable jusqu’à Barcelonnette ou même Guillestre ; en revanche, si leur magnitude reste inférieure à 4 (ce qui est très probable), ils n’auront aucun effet dommageable sur les bâtiments.

Communiqué du 27 février :

Le système de surveillance des Alpes (SISMALP, regroupant la composante Alpes des réseaux RLBP, RéNaSS et RAP) de l’observatoire de Grenoble a enregistré, le dimanche 26 février 2012 à 23 h 38 (heure locale) un séisme de magnitude 4,4 dont l’épicentre était situé à Saint-Paul-sur-Ubaye (Alpes-de-Haute-Provence). Les coordonnées épicentrales sont 44°31’N et 6°43’E. Le foyer était situé vers 10 km de profondeur. Ce séisme a été ressenti localement avec une intensité maximale de IV sur l’échelle EMS dans la haute vallée de l’Ubaye et à Vars (Hautes-Alpes). Mais il a aussi été ressenti à grande distance jusque dans la région grenobloise.

La haute vallée de l’Ubaye est l’une des zones les plus sismiques des Alpes françaises. En 1959, un séisme de magnitude 5,5 qui s’était produit à proximité de Saint-Paul avait généré d’importants dégâts immobiliers et fait deux blessés.

Entre 2003 et 2004, plus de 16000 séismes se sont produits à La Condamine-Châtelard, un peu plus bas dans la vallée. Cette crise sismique en essaim n’était constituée que de séismes de faible magnitude (au maximum 2,7), mais qui avaient été fortement ressentis localement du fait de la faible profondeur des foyers (vers 6 km) à l’aplomb du village.

En moyenne, c’est seulement tous les trois ans qu’un séisme atteint la magnitude 4,5 dans le grand quart sud-est de la France. En raison de sa magnitude, le séisme de cette nuit risque de générer des répliques de magnitude moindre que celle du choc principal (si l’on se trouve dans le cas classique "choc principal + répliques"). De nombreuses répliques se sont effectivement produites au cours de la nuit à un rythme de plusieurs par minute par certains moments. La réplique la plus importante, de magnitude 3,4, s’est produite le 27 février à 00 h 39 heure locale.

Cependant, une légère activité sismique a été observée ces derniers jours dans la zone épicentrale, et l’on ne peut exclure un phénomène d’essaim de séismes très fréquent dans la région (succession de séismes de magnitude quasi-aléatoire).

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Contact

Philippe GUEGUEN, ISTerre-OSUG, chercheur IFSTTAR :
04 76 63 51 74
philippe.gueguen obs.ujf-grenoble.fr

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Mis à jour le 27 mars 2012