VLT : le puissant spectrographe MUSE reçoit sa toute première lumière et ouvre ses yeux sur l’Univers

Alerte presse publiée par le CNRS le 5 mars 2014
L’instrument MUSE installé sur le VLT
Cette photographie montre la quatrième Unité Télescopique du VLT à l’intérieur de son enceinte. Le télescope lui-même figure au centre de l’image, et le nouvel instrument MUSE sur la partie gauche. Cet outil de découverte, puissant et unique à la fois, utilise 24 spectrographes pour séparer la lumière dans ses différentes couleurs afin de créer tant des images que des spectres de régions bien définies du ciel. MUSE associe le potentiel de découverte d’un dispositif d’imagerie aux capacités de mesure d’un spectrographe, tout en bénéficiant de l’excellente résolution d’image qu’offre l’optique adaptative. © Eric Le Roux/University Claude Bernard Lyon 1/CNRS/ESO

Un nouvel instrument unique en son genre baptisé MUSE (Multi Unit Spectroscopic Explorer) a été installé avec succès sur le Très Grand Télescope (VLT) de l’European Southern Observatory (ESO) à Paranal, installé en plein désert d’Atacama au nord du Chili. MUSE constitue l’un des quatre instruments de 2ème génération choisis par l’ESO[1] pour équiper le VLT[2], l’équipement phare de l’astronomie européenne de ce début de troisième millénaire. Ce spectrographe 3D à grand champ de vue va permettre grâce à ses performances exceptionnelles d’explorer l’Univers lointain. Il a été porté notamment par deux laboratoires de recherche français : le Centre de recherche astrophysique de Lyon (CNRS/Université Claude Bernard Lyon 1/ENS de Lyon), qui en est le pilote, et l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (CNRS/Université Toulouse III-Paul Sabatier). D’autres laboratoires français ont également contribué à la réussite de ce grand projet dont l’Institut de planétologie et astrophysique de Grenoble (IPAG - CNRS/Université Joseph Fourier), et Gipsa-lab (CNRS/Grenoble-INP/Université Joseph Fourier/Université Stendhal). Au cours de sa « première lumière » (phase de tests) très concluante, MUSE a pu déjà observer des galaxies lointaines, des étoiles brillantes et bien d’autres objets célestes.

MUSE constitue un assemblage de composants optiques, mécaniques et électroniques de sept tonnes et une fantastique machine à remonter le temps destinée à sonder l’Univers primitif. Cet instrument unique en son genre est le fruit du travail acharné de nombreuses personnes durant plusieurs années sous la houlette du responsable du projet Roland Bacon, directeur de recherche au CNRS au Centre de recherche astrophysique de Lyon. MUSE est le résultat de dix années de conception et de développement à l’échelle internationale[3]. Il est notamment porté en France par deux laboratoires de recherche : le Centre de recherche astrophysique de Lyon (CNRS/ Université Claude Bernard Lyon 1/ ENS de Lyon) qui en est le pilote et l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (CNRS/Université Toulouse III-Paul Sabatier). D’autres laboratoires français ont également contribué à la réussite de ce grand projet : l’Institut de planétologie et astrophysique de Grenoble (IPAG) (CNRS/Université Joseph Fourier), le Laboratoire d’astrophysique de Marseille (LAM) (CNRS/AMU), le Laboratoire d’astrophysique de Bordeaux (LAB) (CNRS/Université de Bordeaux), l’Observatoire de Nice-Côte d’Azur, le Laboratoire des sciences de l’ingénieur, de l’informatique et de l’imagerie (CNRS/Université de Strasbourg) et le Gipsa-lab (CNRS/Grenoble-INP/Université Joseph Fourier/Université Stendhal).

MUSE va permettre de plonger au coeur des tous premiers instants de l’Univers afin de sonder les mécanismes de formation des galaxies, d’étudier les mouvements de la matière et les propriétés chimiques des galaxies proches. Parmi ses autres objectifs scientifiques figure l’étude des planètes et des satellites du Système Solaire, des propriétés des régions de formation stellaires dans la Voie Lactée ainsi que dans l’Univers lointain.

MUSE constitue un outil de découverte à la fois puissant et unique : il utilise ses 24 spectrographes pour séparer la lumière en ses différentes composantes couleur pour constituer à la fois des images et des spectres de régions spécifiques du ciel. Il crée ainsi des vues 3D de l’Univers[4]. Grâce à MUSE, l’astronome peut se déplacer au sein du nuage de données acquises par l’instrument et ainsi étudier différentes vues de l’objet obtenues pour chaque longueur d’onde. MUSE associe le potentiel de découverte d’un dispositif d’imagerie avec les capacités de mesure d’un spectrographe, tout en bénéficiant de l’excellente qualité d’image qu’offre l’optique adaptative.

Après une période d’essai et de validation préliminaires en Europe au mois de septembre 2013, MUSE a été acheminé à l’Observatoire Paranal de l’ESO au Chili. Il a été réassemblé au camp de base puis transporté avec soin sur la plateforme du VLT et finalement installé sur la quatrième Unité Télescopique de l’Observatoire. MUSE sera bientôt suivi par l’instrument SPHERE, dernier né de la seconde génération d’instruments destinés à équiper le VLT.

L’instrument MUSE, la nuit
Cette photographie nocturne est spectaculaire : elle montre l’instrument MUSE à l’intérieur du dôme de la quatrième Unité Télescopique du VLT. Le tube du télescope figure dans la partie supérieure de l’image et MUSE scintille au premier plan. La Voie Lactée apparaît au travers de l’ouverture du dôme. © ESO/Ghaouti Hansali/Fernando Selman
Image de la Nébuleuse d’Orion reconstituée par MUSE
Cette image couleur de la Nébuleuse d’Orion a été constituée à partir des données acquises par le nouvel instrument MUSE qui équipe le Très Grand Télescope de l’ESO. Cet instrument a divisé dans ses différentes couleurs la lumière en provenance de chacune des zones de cette spectaculaire région de formation d’étoiles – révélant, dans le moindre détail, les propriétés physico-chimiques de chaque point. L’image a été créée à partir de plusieurs ensembles de données MUSE obtenus peu après que l’instrument ait capturé sa première lumière en janvier 2014. Afin de créer cette image, des régions bien définies du spectre ont été extraites pour former une image d’une seule couleur. Ce résultat peut paraître impressionnant ; il est pourtant le fruit de la combinaison d’une infime fraction des informations contenues dans les ensembles de données tridimensionnelles acquises par MUSE. © ESO/MUSE consortium/R. Bacon


































Implication de l’Institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble (IPAG) dans MUSE

Interface graphique de l’outil de visualisation temps-réel des données de MUSE
Interactif et intuitif, il permet à l’opérateur d’afficher très facilement le spectre de chaque partie des images reconstruites. Ici, l’affichage en temps réel du transit du satellite Europe sur fond de Jupiter. © CNRS / IPAG – G.Zins

L’IPAG (CNRS/UJF) a développé le logiciel de contrôle-commande de MUSE qui assure la gestion entièrement automatisée de l’instrument pour la collecte et l’enregistrement des données des 24 spectrographes.
Ce logiciel intègre un outil graphique de visualisation des données acquises sur les 24 détecteurs avec l’affichage de l’image reconstruite dans différentes bandes spectrales.
Interactif, ce logiciel de visualisation permet non seulement d’assister l’opérateur pendant la phase de pointage de l’objet céleste mais il permet également d’explorer en temps-réel l’ensemble des données de la planète, de l’étoile ou de la galaxie observée pour une exploitation scientifique immédiate. Basé sur une architecture fortement parallélisée[5], le logiciel traite en une dizaine de secondes, les 90 000 spectres acquis en une pose.

Par ailleurs, ce logiciel intègre un système de guidage secondaire pour compenser les mouvements différentiels[6] entre le télescope et MUSE afin d’assurer une très grande stabilité de l’image, de l’ordre de quelques microns (0.1 arcsec), pendant les poses. Ce système est entièrement automatique et transparent pour l’opérateur ; il ajuste de lui-même le temps d’intégration de la pose et s’assure de la détection/sélection des étoiles guides, pour un fonctionnement optimal de l’instrument.

Ressources
Un reportage photo sur l’instrument MUSE a été co-produit par le CNRS, l’ESO et l’Université Claude Bernard Lyon 1. Les images sont disponibles sur le site de la photothèque du CNRS et sur celui de la photothèque de l’Université Claude Bernard Lyon 1.

Voir la vidéo de présentation de l’instrument MUSE.

Contact scientifique local
 Gérard Zins, IPAG/OSUG : gerard.zins (at) obs.ujf-grenoble.fr
Communiqué de presse

Cette actualité est également relayée par
 l’institut national des sciences de l’Univers du CNRS (INSU)
 CNRS Délégation Alpes


Notes
1. L’ESO (European Southern Observatory) est la première organisation intergouvernementale pour l’astronomie en Europe et est l’observatoire astronomique le plus productif au monde. Au nom de ses 15 pays membres, il gère trois sites d’observation au Chili : La Silla, Paranal et Chajnantor. En Europe, c’est l’ESO qui réalise et gère les plus grands équipements pour l’astronomie au sol.
2. Le VLT (Very Large Telescope) est constitué de 4 télescopes de 8 m de diamètre, associés à une série d’instruments performants.
3. MUSE est le fruit de dix années de conception et de développement réalisés par le consortium MUSE – piloté par le Centre de Recherche Astrophysique de Lyon (CNRS/ Université Claude Bernard Lyon 1/ ENS de Lyon) et les instituts partenaires : l’Institut Leibniz d’Astrophysique de Potsdam (AIP, Allemagne), l’Institut d’Astrophysique de Göttingen (IAG, Allemagne), l’Institut d’Astronomie ETH de Zurich (Suisse), l’Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie (IRAP, France), le Centre de Recherche Néerlandais en Astronomie (NOVA, Pays-Bas) et l’ESO.
4. Cette technique, baptisée spectroscopie intégrale de champ, permet aux astronomes d’étudier les propriétés des différentes parties d’un objet telle qu’une galaxie afin d’observer sa rotation et d’en déduire sa masse. Elle permet également de déterminer la composition chimique ainsi que les propriétés physiques des différentes régions de l’objet étudié. Déjà utilisée depuis de nombreuses années avec MUSE, elle atteint son apogée en termes de sensibilité, d’efficacité et de résolution. MUSE combine simultanément l’imagerie à haute résolution et la spectroscopie.
5. Application logicielle multiprocessus parallélisée permettant de traiter simultanément les données des 24 spectrographes
6. Ces mouvements différentiels sont dus d’une part à la flexion mécanique de la plateforme supportant l’instrument et d’autre part aux mouvements (wobble) du dérotateur de champ.

Mis à jour le 20 mars 2017