Surveillez les champs magnétiques stellaires : ils sont changeants !

Le système optique du spectrographe SPIRou dans la salle blanche de l’IRAP/OMP à Toulouse. © S. Chastanet – Service communication OMP
Des observations menées à l’aide des instruments ESPaDOnS et SPIRou au Télescope Canada-France-Hawaii (TCFH) et NARVAL au Télescope Bernard Lyot (TBL) apportent des données inédites sur le champ magnétique des étoiles naines rouges. Une équipe internationale de chercheurs, comprenant des scientifiques de l’Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble (IPAG), membre de la fédération OSUG, a scruté l’étoile naine rouge exceptionnellement active, AD Leonis, sur plusieurs années. Cette étoile, environ mille fois plus magnétique que le Soleil, a manifesté des signes de basculement de ses pôles magnétiques, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour mieux appréhender la formation du champ magnétique des étoiles plus froides que le soleil.

Le cycle d’activité solaire de 11 ans est un phénomène bien connu, au cours duquel l’intensité du champ magnétique du Soleil varie et ses polarités s’inversent. Au cours des 30 dernières années, les astronomes ont identifié un comportement similaire pour plusieurs étoiles semblables au Soleil. Mais jusqu’à présent, aucune inversion de polarités magnétiques n’a été observée pour leurs homologues plus froides, les étoiles naines rouges.

Une équipe internationale incluant des scientifiques du CNRS [1] vient de montrer que le champ magnétique de la naine rouge extrêmement active AD Leonis pourrait s’approcher d’un renversement de polarités. Ces données ont été obtenues à l’aide des instruments ESPaDOnS [2] et SPIRou [3] au Télescope Canada-France-Hawaii (TCFH) ainsi que NARVAL [4] au Télescope Bernard Lyot (TBL).

AD Leonis est une étoile naine rouge notoirement active, qui possède un champ magnétique environ 1000 fois plus intense que celui du Soleil. Bien que des indices de cycles d’activité existent, on ne sait pas encore si les naines rouges peuvent présenter des cycles magnétiques.

AD Leonis a été observée depuis 2006 avec les instruments ESPaDOnS et NARVAL, et depuis 2019 avec SPIRou. L’étude menée par Stefano Bellotti, doctorant à l’IRAP, montre que non seulement l’intensité du champ magnétique diminue continûment sur cette période, mais également que les pôles magnétiques de l’étoile ont commencé à basculer. Bien qu’une inversion de polarités n’ait pas eu lieu pendant les observations SPIRou, ces résultats indiquent que les naines rouges comme AD Leonis pourraient subir des cycles magnétiques, comme le Soleil.

Ce résultat permet donc de mieux comprendre la génération du champ magnétique des étoiles plus froides que le Soleil. En outre, l’étude du champ magnétique des naines rouges ‒ cibles privilégiées pour la détection d’exoplanètes rocheuses semblables à la Terre ‒ est essentielle pour comprendre l’environnement spatial dans lequel les exoplanètes rocheuses orbitent.


Références

Belloti S. et al. Monitoring the large-scale magnetic field of AD Leo with SPIRou, ESPaDOnS, and Narval, Astronomy & Astrophysics, 676, A56. DOI : 10.1051/0004-6361/202346845

Contact scientifique local

 Xavier Delfosse, astronome OSUG à l’IPAG / OSUG

Cet article a initialement été publié par le CNRS INSU.

[1Laboratoires CNRS impliqués
 Institut de recherche en astrophysique et planétologie (IRAP - OMP)
Tutelles : CNRS / CNES / Université Toulouse 3
 Institut de planétologie et d’astrophysique de Grenoble (IPAG - OSUG)
Tutelles : CNRS / Université de Grenoble
 Institut d’astrophysique de Paris (IAP)
Tutelles : CNRS / Sorbonne Université
 Laboratoire d’astrophysique de Marseille (LAM - OSU Pytheas)
Tutelles : CNRS / CNES / Aix Marseille Université
 Laboratoire univers et particules de Montpellier (LUPM - OREME)
Tutelles : CNRS / Université de Montpellier

[2Le spectropolarimètre stellaire de nouvelle génération ESPaDOnS est un projet financé dans le cadre d’un partenariat entre la France (CNRS/INSU, Ministère de la Recherche, LATT - Observatoire Midi Pyrénées, Laboratoire d’Etudes Spatiales et d’Instrumentation en Astrophysique - Observatoire de Paris), le Canada (NSERC), le Télescope Canada-France-Hawaii et l’ESA (ESTEC/RSSD).

[3SPIRou est à la fois un spectropolarimètre et un velocimètre de haute précision fonctionnant dans le proche IR (0.98-2.35µm). SPIRou est un projet international, géré par un consortium réparti sur France, Canada, Suisse, Taiwan, Portugal, Brésil et Hawaii. Coté français 4 laboratoires sont impliqués au niveau technique : IRAP (Toulouse), IPAG (Grenoble), OHP/LAM (Marseille) et LESIA (Meudon).

[4Comme son jumeau ESPaDOnS, NARVAL est spectropolarimètre stellaire, développé au sein de l’Observatoire Midi-Pyrénées (OMP – CNES/CNRS/Météo France/IRD/UT3 Paul Sabatier), par les équipes scientifiques et techniques de l’Institut de recherche en astrophysique et planétologie (Irap/OMP – CNRS / CNES / UT3 Paul Sabatier), du Télescope Bernard Lyot (TBL) et les services communs de l’OMP.

Mis à jour le 16 novembre 2023