Suivre en temps réel de la nucléation et de la croissance de particules ou de cristaux

Des chercheurs de l’ l’Institut des sciences de la Terre (ISTerre/OSUG, CNRS / UGA / IRD / IFSTTAR / Université de Savoie) et de l’Université d’Oslo (Norvège) ont mis au point un nouveau dispositif expérimental qui permet de suivre, en temps réel et pour de larges conditions de température et de pression, des processus de nucléation et de croissance de particules ou de cristaux impliquant des systèmes homogènes ou hétérogènes. Ils ont notamment pu mesurer, pour la première fois en temps réel, la transformation du carbonate de fer amorphe en sidérite (phase cristalline).

Le processus de formation de particules ou de cristaux est omniprésent dans les milieux naturels aqueux. Il est en outre impliqué dans de multiples applications et usages du monde moderne : remédiation de sites pollués, dépollution des eaux chargées en métaux, purification/séparation de protéines et molécules (macro-) organiques, fabrication des matériaux nanostructurés d’intérêt commercial, stockage de gaz (CO2, H2), fabrication de médicaments et d’additifs alimentaires, etc.
Cependant, du point de vu fondamental, la compréhension des mécanismes de nucléation, qui impliquent la formation des premiers arrangements atomiques de matière condensée dans une solution ionique (nucléation homogène) ou aux interfaces solide-liquide (nucléation hétérogène), et des mécanismes de croissance des nucleus ainsi formés est encore en débat car un nombre important de systèmes ne suivent pas la loi "dite" classique : la formation spontanée de germes de matière condensée (cristaux ou particules), puis leur croissance à partir d’une "taille critique". Si les mesures de suivi in situ par des méthodes spectroscopiques, microscopiques et de diffraction de rayons X ont apporté des informations significatives au cours des dernières décennies, elles demeurent rares et sont souvent limitées par la taille (ex. suspension contenant des nanoparticules < 3nm) et la concentration des particules, par la pression et la température du système étudié (ex. conditions hydrothermales), par le temps de réaction (de quelques ms à quelque jours), par le chevauchement de processus (ex. nucléation concurrentielle), etc.

Des chercheurs d’ISTerre et de l’Université d’Oslo ont développé un dispositif expérimental original qui consiste en un couplage d’un réacteur hydrothermal (-15 ≤ T ≤ 300°C, 1 ≤ P ≤ 300 bar) avec un spectromètre Raman via une sonde immergée dans la phase réactive (solution et/ou suspension).

Dispositif expérimental couplant un réacteur hydrothermal à un spectromètre Raman via une sonde immergée dans la phase liquide et spectre Raman de la nucléation et de la croissance de la magnésite sous conditions hydrothermales (T = 90°C et PCO2i = 50 bar).

Les chercheurs ont démontré pour une série de carbonates que ce dispositif expérimental permettait de mesurer en temps réel des processus de nucléation de particules et/ou de cristaux, 3s après leur déclenchement et pendant quelques jours. Ils ont également pu mesurer, pour la première fois en temps réel, la transformation du carbonate de fer amorphe en sidérite (phase cristalline).

Suivi de la condensation spontanée du carbonate de fer amorphe "spinodal decomposition" et puis de sa transformation en sidérite (mesocrystals).

Ce dispositif de suivi in situ par Raman ouvre de nouvelles perspectives pour étudier et mieux comprendre la nucléation et la croissance des particules et cristaux dans une large gamme de pression et température et impliquant des systèmes homogènes (interactions solution-solution) ou hétérogènes (interactions solide-fluide).

Source :
Time-resolved in situ Raman spectroscopy of the nucleation and growth of siderite, magnesite and calcite and their precursors, German Montes-Hernandez and Francois Renard, Cryst. Growth Des, 2016 . DOI : 10.1021/acs.cgd.6b01406

Contact scientifique local :
 German Montes-Hernandez, ISTerre/OSUG : german.montes-hernandez (at) univ-grenoble-alpes.fr 04 76 51 40 76

Cette actualité est également relayée par
 l’institut national des sciences de l’Univers du CNRS (INSU)

Mis à jour le 6 janvier 2017