HARMONI ouvre la voie pour l’exploitation scientifique de l’ELT

Artist’s impression of the Extremely Large Telescope (ELT) © ESO
Des laboratoires français [1], incluant l’IPAG/ OSUG (CNRS, UGA), viennent de franchir une étape majeure pour HARMONI, le spectro-imageur à très haute résolution de l’Extremely Large Telescope. Avec un miroir primaire de 39m de diamètre, l’ELT est le plus grand télescope optique jamais construit par l’Observatoire Européen Austral (ESO), l’agence européenne pour l’astronomie au sol. Les performances exceptionnelles d’HARMONI permettront aux astronomes de répondre à des questions fondamentales, depuis la recherche et la caractérisation de planètes extrasolaires jusqu’à la formation et à l’évolution des premières galaxies de l’Univers.

HARMONI vient de finaliser, avec succès, sa phase de concept préliminaire. Au sein d’un consortium européen mené par l’Université d’Oxford, les laboratoires français (Marseille, Lyon, Grenoble et Toulouse) ainsi que l’ONERA ont largement participé à ce succès. Les équipes sont maintenant mobilisées pour finaliser la conception, et débuter les intégrations et tests à partir de 2021. C’est un pas décisif vers les premières observations prévues pour 2025 et HARMONI est le tout premier instrument de l’ELT à l’avoir franchi !

L’année 2018 aura réservé une autre bonne nouvelle pour HARMONI : le conseil de l’ESO vient d’approuver le financement d’un module d’Optique Adaptative* assistée par Laser (ou LTAO en anglais), afin d’améliorer encore les performances de l’instrument et d’assurer une qualité d’image exceptionnelle sur la quasi-totalité de la voute céleste.

Un instrument unique

HARMONI, un instrument unique aux dimensions exceptionnelles. © Consortium HARMONI

Avec ses 8 m de haut, 10 m de long et 6 m de large, pour un poids total d’environ 40 tonnes, HARMONI sera un instrument unique doté de capacités exceptionnelles. Avec une résolution spatiale de 10 millisecondes d’arc (qui lui permettrait de distinguer un terrain de tennis sur la lune ou encore une boule de pétanque à Paris depuis Marseille) et une résolution spectrale de 3000 à 20000, HARMONI offrira aux astronomes des performances inégalées pour sonder l’Univers des longueurs d’onde allant du visible jusqu’au proche infra-rouge (0,6 à 2,5 micromètres) et apporter ainsi des réponses aux grandes questions de l’astronomie du XXIe siècle. Il permettra en particulier l’observation des toutes premières galaxies formées dans l’Univers et mettra en évidence leur impact sur la ré-ionisation jusqu’à un décalage spectral de z = 10. Un champ profond d’HARMONI permettra de révéler ces toutes premières galaxies, les générations d’étoiles précoces et les premiers enrichissements du milieu intergalactique.
 
 
 
 
 
 
 

Pour fournir des informations inégalées

Images HARMONI simulées du satellite Io de Jupiter, d’une taille de 3640 km l’image représente Io en mode LTAO, avec une résolution spatiale de 12 km par pixel (4 millisecondes d’arc). Un grand nombre de structures géologiques sont visibles en surface, en particulier les volcans. Io, qui compte plus de 400 volcans, est le satellite le plus actif du système solaire. © : O. Groussin (LAM)

HARMONI fournira des informations d’une précision inégalée sur l’enfance des galaxies, depuis 1 milliard d’années seulement après le Big-Bang. HARMONI ouvrira ainsi la voie à une compréhension détaillée de l’évolution de la composition chimique, du contenu en matière sombre, de la morphologie, et de la formation stellaire sur une période de plus de 5 milliards d’année de l’histoire de l’Univers. Grâce à l’Optique Adaptative, HARMONI pourra disséquer le cœur de ces galaxies, mettre en évidence la présence de trous noirs, mesurer les propriétés du gaz et des trous noirs et étudier les liens avec la formation stellaire de ces galaxies.

Dans l’Univers local (dans un rayon de 100 millions d’années-lumière autour du soleil), HARMONI pourra résoudre les différentes populations d’étoiles au sein des galaxies proches, remonter le fil des évolutions chimiques, dynamiques et ainsi décoder l’histoire individuelle de ces galaxies. Toujours dans l’Univers proche, HARMONI pourra détecter la présence de trous noirs de masses intermédiaires (102 à 105 masses solaires), des objets dont la nature est actuellement mal comprise.

Au sein de la Voie Lactée, la résolution spatiale d’HARMONI ouvrira une nouvelle fenêtre sur l’étude des naines brunes et des objets de masse planétaire, en particulier dans les amas jeunes. Une des particularités d’HARMONI sera la mise en place d’un mode d’observation dédié à la détection et la caractérisation des planètes extrasolaires. Leur analyse spectrale, via la mesure des abondances de diverses molécules, permettra de mieux comprendre leur formation, et la physique-chimie de leurs atmosphères.

Enfin, au sein de notre système solaire, HARMONI fournira des images dont la qualité s’approche de celles des sondes actuelles. HARMONI pourra ainsi suivre les tempêtes sur Neptune, les volcans sur Io, ou les interactions entre Europe et Jupiter. Une cartographie précise des astéroïdes et objets trans-neptuniens sera à la portée des astronomes.

Pour exploiter pleinement la qualité d’image unique de l’ELT, le cœur d’HARMONI consistera en ses modules d’Optique Adaptative (OA), dont l’objectif est de corriger en temps réel des perturbations introduites par l’atmosphère terrestre. En effet, ces dernières entraînent une perte significative en performance : sans Optique Adaptative, l’ELT délivrerait une qualité d’image équivalente à celle d’un télescope amateur de 20 cm. HARMONI sera équipé de deux systèmes : un système d’OA classique (SCAO) et un système d’OA grand champ, assisté par étoiles lasers (LTAO).


► Cette actualité a été publiée initialement par le CNRS-INSU.

Contact scientifique local

 Alexis Carlotti, IPAG/OSUG | alexis.carlotti univ-grenoble-alpes.fr

Publié le 7 janvier 2019

[1Les laboratoires impliqués sont le Laboratoire d’Astrophysique de Marseille (LAM, AMU/CNRS/CNES), le Centre de Recherche Astrophysique de Lyon (CRAL, CNRS/UCBL1/ENS de Lyon), l’Institut de Recherche en Astrophysique et Planétologie de Toulouse (IRAP, CNRS/CNES/Univ Toulouse III), l’Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble (IPAG, CNRS/UGA) et le Centre français de recherche aérospatiale (ONERA).

Mis à jour le 11 février 2019