Les sommets des Alpes verdissent… et certains beaucoup plus vite que d’autres

Crête située entre le Becca d’Aver et la Cima Longhede sur la commune de Torgnon (Aoste, Italie). Altitude : 2500 m. Le versant nord (à droite de l’image) montre une dynamique de colonisation par les arbustes et les arbres. © Marta Galvagno / ARPA.
C’est une conséquence moins connue des changements globaux qui sont en cours : depuis quelques décennies, les plantes colonisent peu à peu les espaces de haute altitude et les sommets de nos montagnes verdissent. Une étude internationale impliquant le Laboratoire d’Écologie Alpine [1] (LECA / OSUG), publiée dans Global Change Biology, permet pour la première fois de mieux comprendre ce phénomène à l’échelle des Alpes européennes grâce à l’utilisation d’images satellite.


Si la plupart des écosystèmes situés au-dessus de la limite supérieure des forêts présentent un verdissement significatif depuis au moins 20 années, le phénomène est beaucoup plus rapide dans certains massifs. C’est particulièrement le cas en France, où quelques grands massifs des Alpes du sud comme l’Oisans ou le Mercantour peuvent être considérés comme des points chauds de verdissement (greening hotspots). A l’échelle plus locale, il est montré que le verdissement affecte principalement les versants pierreux, exposés au nord et situés au-dessus de 2200 m d’altitude. Dans ces conditions, la dynamique de colonisation par les plantes (principalement des graminées, arbustes et arbres pionniers) est très marquée. Tout se passe comme si les plantes de ces milieux inhospitaliers étaient celles qui profitaient le plus des changements en cours. Les quelques observations de terrain disponibles confirment ces résultats.

Avec l’augmentation marquée des températures estivales en montagne depuis les années 1980, les conditions deviennent globalement plus favorables à la croissance des plantes, mais les écosystèmes réagissent plus ou moins rapidement et fortement à ce changement climatique. Leur réponse est modulée par des conditions locales telles que la durée d’enneigement, la disponibilité en eau, la fertilité et la stabilité des sols, l’activité pastorale, etc. C’est en considérant l’ensemble de ces facteurs que pourront être analysées plus finement les causes de la variabilité géographique du verdissement et ses conséquences sur la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes d’altitude.

Végétation pionnière d’éboulis à proximité du col du Galibier (Hautes-Alpes) vers 2800 m d’altitude, soit au-dessus de la limite supérieure des pelouses d’alpage. C’est l’un des principaux habitats de haute altitude dans lequel s’observe un verdissement prononcé depuis quelques décennies. Ce verdissement s’explique par la densification du couvert de plantes herbacés, qui bénéficient d’étés plus chauds tout en conservant une bonne alimentation en eau. © Philippe Choler LECA / OSUG

Référence

Choler, P., Bayle, A., Carlson, B.Z., Randin, C., Filippa, G., & Cremonese, E. (2021)., The tempo of greening in the European Alps : Spatial variations on a common theme, Global Change Biology, 00,000-000
DOI : https://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/gcb.15820

Contact scientifique local

 Philippe Choler, Chargé de mission eLTER-RI, LECA/ OSUG

Cet article a été publié initialement publié par le CNRS.

[1Laboratoire d’Écologie Alpine (LECA / OSUG - UGA, CNRS, USMB)

Mis à jour le 13 septembre 2022