Une tendance à la hausse pour les pluies extrêmes dans le sud-est de la France
Afin d’étudier l’évolution des pluies extrêmes entre 1958 et 2014 dans la région méditerranéenne du sud-est de la France, des chercheurs du Laboratoire d’études des transferts en hydrologie et environnement (LTHE/OSUG, Université Grenoble Alpes / CNRS / INPG / IRD) ont analysé, à l’aide d’un modèle statistique, deux jeux de données correspondant à des échelles spatiales différentes. Il ressort de ce travail qu’au niveau de la région étudiée, les pluies extrêmes ont connu une relative stabilité des années 60 jusqu’au milieu des années 80, suivie d’une augmentation jusqu’à nos jours.
Il est maintenant avéré que le changement climatique global affecte le cycle hydrologique. Cependant l’attribution de la variabilité régionale de ce cycle aux processus climatiques et météorologiques reste une question ouverte.
La région méditerranéenne du sud-est de la France est particulièrement sensible aux épisodes de fortes pluies. Parmi les plus récents événements mémorables, on peut citer les crues gardoises de 1958 et de 1988 (Nîmes), les crues de l’Ouvèze (Vaison-la-Romaine) en 1992, de l’Aude en 1999, du Gard en 2002, du Nartuby (Draguignan) en 2010, de l’Hérault en 2013, 2014 et 2015, et l’inondation de Cannes au début du mois d’octobre 2015...
Au regard de ces dates, les chercheurs s’interrogent : ces événements de pluies extrêmes sont-ils devenus plus fréquents que dans le passé et qu’en sera-t-il dans le futur ?
Un moyen de répondre à ces questions est d’étudier la tendance de ces fortes pluies. Depuis les années 2000, les études de tendances sur la région méditerranéenne du sud-est de la France se sont multipliées, mais avec des méthodologies et des zones d’études différentes. Elles ont conduit à des résultats contrastés qui n’ont pu être attribués jusqu’à présent aux différences de méthodologie ou à la variabilité du cycle hydrologique.
Dans le cadre des actions collaboratives soutenues par le programme MISTRALS du CNRS via le projet HyMEx (HYdrological cycle in the mediterranean evperiment), des chercheurs du LTHE, d’Hydro-Sciences Montpellier (HSM/OREME, CNRS / Université de Montpellier / IRD) et du Centre national de recherches météorologiques (CNRM, CNRS / Météo-France) ont initié une collaboration dans le but de comparer diverses méthodologies utilisées pour détecter les tendances des pluies extrêmes, de fournir un diagnostic unique et consensuel pour la région méditerranéenne du sud-est de la France sur la tendance passée de ces événements et enfin d’estimer leur tendance future à l’aide de la modélisation du climat régional (Med-CORDEX).
Les chercheurs du LTHE ont tout d’abord montré, sur le plan méthodologique, qu’il était indispensable de travailler dans un cadre probabiliste en utilisant un modèle de probabilité d’occurrence des forts cumuls quotidiens de pluie (ici, les maxima annuels de ces cumuls) pour filtrer les problèmes inhérents à l’échantillonnage de la pluie.
Ce travail s’est différencié des précédents sur plusieurs points :
– un terrain d’étude plus vaste qui incluait 7 départements de la région méditerranéenne du sud-est de la France ;
– une analyse à deux échelles spatiales pour évaluer les cumuls de pluie, une échelle ponctuelle (données issues de pluviomètres) et une échelle de 8x8 km2 (données SAFRAN [1] ;
– l’utilisation d’un modèle probabiliste avec lequel plusieurs scénarii d’évolution des fortes pluies ont été évalués, qui incluaient tous une période de transition précédée ou suivie d’une période d’augmentation ou de diminution des cumuls de pluie.
L’étude a porté sur la période 1958-2014. Il s’avère qu’à l’échelle de la région, le scénario le plus probable est une stabilité jusqu’au milieu des années 80 puis une augmentation jusqu’à nos jours des maxima annuels des cumuls quotidiens de pluie.

Dans un futur proche, les chercheurs s’attacheront à vérifier la fiabilité de ces résultats, à s’assurer que les modèles climatiques régionaux reproduisent ces tendances pour ensuite estimer les tendances futures en fonction de différents scénarii d’émission des gaz à effet de serre et d’aérosols et enfin à mettre en place une méthodologie permettant l’attribution de ces résultats aux processus physiques sous-jacents.
Source :
Blanchet J., G. Molinié and J. Touati, 2016, Spatial analysis of trend in extreme daily rainfall in southern France, accepted for publication in Climate Dynamics, doi : 10.1007/s00382-016-3122-7
Contacts scientifiques locaux :
– Gilles Molinié, LTHE/OSUG : gilles.molinie (at) univ-grenoble-alpes.fr
– Juliette Blanchet, LTHE/OSUG : juliette.blanchet (at) univ-grenoble-alpes.fr
Cette actualité est également relayée par
– l’institut national des sciences de l’Univers du CNRS (INSU)
Note
1. Ces données SAFRAN (Système d’analyse fournissant des renseignements adaptés à la nivologie) sont issues d’une ré-analyse de données météorologiques.
Mis à jour le 24 août 2016