Développement d’outils et de méthodes innovants pour le suivi des débits en rivière de montagne

Durée : 5 à 6 mois à partir de février 2025
Laboratoire(s) de rattachement : IGE
Encadrant(s) : Guillaume Nord
Co-encadrant(s) : Alexandre Hauet
Contact(s) : guillaume.nord univ-grenoble-alpes.fr ; alexandre.hauet univ-grenoble-alpes.fr
Lieu : IGE, bâtiment OSUG-B, dans l’équipe HyDRIMZ-STRIM
Niveau de formation & prérequis : Master 2 en sciences de l’environnement ou BAC+5

Contexte du stage
De nombreuses applications nécessitent le suivi du débit des cours d’eau, tant dans le domaine opérationnel (e.g. systèmes d’alerte aux inondations et aux sécheresses, gestion des ressources en eau, production hydroélectrique) que dans le domaine académique (e.g. modélisation hydrologique, flux d’eau et de matière associée). Cependant, le suivi du débit n’est pas trivial. Historiquement, le suivi des débits s’est réalisé au niveau de stations hydrométriques via le suivi en continu du niveau d’eau et la transformation du niveau d’eau en débit grâce à la courbe de tarage (ou relation hauteur-débit), laquelle est établie à partir d’un jeu de jaugeages, éventuellement complété par de la modélisation hydraulique. Cette approche conventionnelle est toujours l’approche la plus utilisée à ce jour même si elle est relativement onéreuse à mettre en place et à maintenir dans la durée car elle requiert beaucoup de ressource humaine et notamment du personnel qualifié pour les jaugeages et les levés bathymétriques. Ces éléments constituent d’ailleurs des facteurs limitants à l’heure où les enjeux scientifiques et sociétaux demandent davantage de données de débits, notamment dans les petits cours d’eau de tête de bassin versant (<100 km²) où les données sont lacunaires et où la télédétection satellitaire ne peut pas apporter d’information.

Dans le cas des rivières de montagne, les stations hydrométriques conventionnelles présentent d’autres inconvénients : 1) l’exposition aux risques hydrométéorologiques pour le personnel , 2) l’exposition des équipements installés dans l’eau qui peuvent être perdus ou endommagés lors des hautes eaux, 3) les changements morphologiques causés par les processus d’érosion et de dépôt de sédiments dans le lit de rivière qui modifient la courbe de tarage et peuvent même rendre cette approche inopérante si les changements sont trop fréquents.
Pour dépasser ces limites, nous travaillons au développement d’une nouvelle méthode de suivi des débits dans les cours d’eau de montagne. Notre approche s’appuie sur des instruments sans-contact (Nord et al., 2020) : radars fixes H-V pour le suivi du niveau d’eau et de la vitesse de surface en continu à haute résolution ( 10 min) complétés par l’imagerie pour la mesure du champ des vitesses de surface pendant les crues (séquence vidéo de 10 s toutes les 30 min). Nord et al. (en révision) ont montré qu’il est possible d’établir une relation de proportionnalité entre la vitesse de surface maximale (Vs,max) et la vitesse moyenne dans la section appelée aussi vitesse débitante (Umean). Cette relation est insensible aux changements morphologiques et pourrait constituer une propriété intrinsèque de la section. En outre, l’emplacement de Vs,max s’avère stable en dépit des changements morphologiques. Il est donc proposé de positionner le radar de vitesse de surface à l’aplomb de Vs,max dans la section d’intérêt. Nord et al. (en révision) restreignent les conditions d’application de cette approche aux rivières pentues (> 1%) et chenalisées, aux tronçons linéaires et uniformes avec des vitesses quasi 1D et au lit mineur. Nord et al. (en révision) ont aussi montré qu’il est possible de détecter les moments précis des changements morphologiques en représentant graphiquement les deux variables issues des radars (niveau d’eau et vitesse de surface) l’une contre l’autre. Une discontinuité apparaît dans la relation entre les deux variables lorsqu’un changement morphologique se produit. On peut attribuer à chaque période bathymétrique stable, une relation entre le niveau d’eau et l’aire de la section débitante appelée aussi aire de la section mouillée sur la base de levés topo-bathymétriques réalisés manuellement. In fine, le débit est calculé à chaque pas de temps ( 10 min) en multipliant la vitesse débitante (issue de Vs,max et donc du radar de vitesse) et l’aire de la section mouillée. Cette méthode doit encore être testée contre des données de référence pour être totalement validée.

Si la méthode présentée précédemment fonctionne, elle permettra de minimiser le recours aux jaugeages. Pour réduire encore le besoin en opérateur de terrain, il faudrait automatiser le levé topo-bathymétrique de la section d’intérêt. A ce jour, il n’existe pas de technique de mesure mature permettant d’accomplir cette tâche, en particulier pendant les crues. En revanche, comme les débits de base sont généralement faibles dans les cours d’eau pentus ( pente supérieure à 1%) en dehors des périodes de crue et que la majeure partie du lit de la rivière est exposée à l’air à basses eaux, une grande partie de la topographie de la section peut être directement mesurée par des techniques comme la stéréo LSPIV ou le LiDAR (Stumpf et al., 2016 ; Picard et al., 2019). Nous proposons d’utiliser un lasermètre LiDAR proche infra-rouge (PIR) rotatif depuis un point fixe au-dessus de l’eau et de re-construire progressivement la topographie de la partie émergée de la section à mesure que le niveau d’eau baisse.

Dans le cadre du projet Equipex + TERRA FORMA, une station hydrométrique « low cost » et « low tech », autonome en énergie et communicante, reposant sur des techniques non-intrusives est en cours de développement à l’IGE. Des capteurs disponibles sur étagère et issus du monde industriel ont été retenus : radar pour le niveau d’eau, radar pour la vitesse de surface et lasermètre LiDAR PIR pour la topographie. Le cahier des charges, la veille technologique et l’achat des capteurs ont été réalisés. Le radar V est en cours d’intégration sur un microcontrôleur de type Arduino (Guyard et al., 2024). D’autre part, le LiDAR PIR a été monté sur un dispositif rotatif pour suivre la topographie de la partie émergée de la section de rivière depuis un point fixe au-dessus de l’eau. Un premier prototype a été développé et des données ont été acquises durant une phase de test au niveau de la station sur le Sonnant d’Uriage. Cette station a aussi servi d’intercomparaison de différentes techniques de mesure de vitesse de surface (3 modèles commerciaux de radar de vitesse, une micro-station Vortex utilisant l’imagerie). Durant l’automne 2024, une période de test du radar de vitesse « low cost » intégré à un microcontrôleur « low tech » est en cours sur la station du Doménon à Domène (gérée par la DREAL 38) pour évaluer le comportement de ce capteur pour le suivi des vitesses en rivière en comparaison avec des mesures de référence (radar commercial et caméra).

Objectifs du stage
Les objectifs de ce stage seront à choisir parmi cette liste :
1) Qualifier les données de vitesse issues de l’intercomparaison réalisée sur le Sonnant d’Uriage.
2) Evaluer les performances du capteur radar « low cost » pour le suivi des vitesses de surface de l’eau
3) Développer une méthodologie de reconstitution de la topo-bathymétrie par LiDAR PIR en s’appuyant sur les données acquises in situ
4) Réaliser des essais en canal de laboratoire visant à déterminer l’effet de la rugosité de surface de l’eau, de l’épaisseur d’eau et de la turbidité de l’eau sur la pénétration du signal LiDAR PIR dans l’eau.

Compétences attendues
• Goût pour la métrologie et l’instrumentation
• Aisance en programmation (de préférence en R et Python)
• Connaissances générales en hydraulique et hydrologie

Candidature
Transmettre CV et lettre de motivation à guillaume.nord univ-grenoble-alpes.fr et alexandre.hauet univ-grenoble-alpes.fr

Références

  • Guyard, H., Rousseau, C., Nord, G. (2024). Station hydrométrique : un radar de vitesse de surface low-tech, Ateliers Expérimentation et Instrumentation AEI-2024, Rennes, France, 25-28 juin.
  • Nord, G., Michielin, Y., Biron, R., Esteves, M., Freche, G., Geay, T., et al. (2020). An autonomous low-power instrument platform for monitoring water and solid discharges in mesoscale rivers. Geoscientific Instrumentation, Methods and Data Systems, 9(1), 41–67. https://doi.org/10.5194/gi-9-41-2020.
  • Nord, G., Safdar, S., Hasanyar, M., Eze K.O., Biron R., Freche G., Denis H., Legout C., Hauet A., Esteves M. (in revision in Water Resources Research). Streamflow monitoring at high temporal resolution based on non-contact instruments and manually surveyed bathymetry in a river prone to bathymetric shifts.
  • Picard, G., Arnaud, L., Caneill, R., Lefebvre, E., & Lamare, M. (2019). Observation of the process of snow accumulation on the Antarctic Plateau by time lapse laser scanning. The Cryosphere, 13(7), 1983–1999. https://doi.org/10.5194/tc-13-1983-2019.
  • Stumpf, A., Augereau, E., Delacourt, C., & Bonnier, J. (2016). Photogrammetric discharge monitoring of small tropical mountain rivers : A case study at Rivière des Pluies, Réunion Island : PHOTOGRAMMETRIC DISCHARGE MONITORING. Water Resources Research, 52(6), 4550–4570. https://doi.org/10.1002/2015WR018292.

Mis à jour le 16 octobre 2024